Né en 1942 à Kinshasa ( République Démocratique du Congo), de parents originaires de la province septentrionale de Uige, en Angola, l’auteur-compositeur, arrangeur et chanteur Mario Matadidi Mabele aka Mario Matadidi ou Mario fut membre fondateur du fameux groupe Trio Madjesi & l’Orchestre Sosoliso, fondé en 1972 avec Saak Saakul et Loko Massengo. Fondateur des groupes Ode-Negro, Buana Kitoko E.S. Orquestra et Inter Palanca, celui qu’on appelle aussi « Bwana Kitoko » (« beau garçon » en lingala) propose de l’afro-fusion ou de l’afro-pop, des musiques entre semba, kizomba et kilapanga angolais, rumba et soukouss congolais, merengue et afro-cubain, avec des parfums soul, jazz, funk ou pop… Le tout chanté en lingala, swahili, kikongo, français, portugais ou créole portugais. Mario Matadidi a collaboré avec de nombreux artistes et groupes, dont Moro Beya Maduma, Ode-Jazz, TP OK Jazz de Franco, Albino Kalombo, Honoré Muamba, Mulimbi, Conga-Fiesta ou encore Orchestre Vévé de Verckys Kiamuangana… ”
Camille Feruzi, Tino Rossi
A la fin des années 1950/début 1960, malgré l’opposition de son père Jean Mboma, et par l’entremise de Zacharie, Mario Matadidi rencontre Camille Feruzi, le célèbre accordéoniste et chanteur mêlant rumba congolaise, jazz et cha cha cha ([afro-cubain>4693]) qui lui demande de lui jouer un morceau. C’est ainsi qu’il débute dans la musique en interprétant « Guitare d’amour » du chanteur et acteur français Constantin Rossi aka Tino Rossi (1907-1983).
Albino Kalombo
En 1961, Mario Matadidi rejoint le saxophoniste ténor Beya Maduma aka Moro Maurice qui anime, avec l’orchestre Ode-Jazz, les nuits chaudes du nganda Chez Alphonso, un bar-restaurant-dancing situé dans la commune de Bandalungwa, à Kinshasa. Lors d’une soirée où Beya est absent, la prestation de Mario Matadidi séduit le patron des lieux, Alphonso, qui l’engage aussitôt. Mais bientôt un différend avec Moro Beya Maduma à cause d’une fille nommée Anna va précipiter son départ. C’est alors qu’un homme lui propose de quitter Kinshasa pour Luluabourg (actuel Kananga), dans la province du Kasaï-Central. C’est ainsi qu’il rejoint l’orchestre de rumba congolaise–mambo du saxophoniste, clarinettiste et trompettiste Albino Kalombo aka Albino, à Mbuji-Mayi (l’eau de la chèvre) ou Mbujimayi (ex Bakwanga), chef-lieu de la province du Kasaï-Oriental.
Mario Matadidi, le globe-trotter
Ne se sentant pas à l’aise au sein de cette formation, Mario Matadidi trouve très vite un propriétaire d’un bar, Mwamba Honoré, qui lui propose d’animer son lieu déjà doté d’un équipement (sono, instruments). Aussitôt, il fonde son premier groupe, Ode Negro (Orchestre distingué de Nègres), qui enthousiasme les mélomanes. Sollicités par la suite par le Bar Lasson de Lubumbashi, dans la province du Katanga, Mario Matadidi & Ode Negro ne pouvent honorer ce contrat à cause du conflit qui oppose les casques bleus de l’ONU aux mouvements séparatistes katangais (1961-1962). Il décide alors de se rendre dans la capitale de la Zambie, Lusaka, où il fait la connaissance de Baba Gaston (1936-1997), un musicien originaire de Likasi, dans la province du Shaba (République Démocratique du Congo) et fondateur de l’orchestre Baba National, alors en tournée dans la région. De là, il rejoint Bulawayo en Rhodésie du Sud (Zimbabwe depuis 1980), en plein conflit entre Josua Nkomo, leader du mouvement indépendantiste ZAPU (Zimbabwe African People’s Union ou L’Union du peuple africain du Zimbabwe) et Ian Smith, membre notable du Front rhodésien et Premier ministre de la Rhodésie du Sud. Au vu de la situation politique du pays, Mario Matadidi regagne Lubumbashi où il intègre l’orchestre de Mulimbi chez qui il loge. Ensuite, il rejoint Conga Fiesta, célèbre un orchestre de l’époque qu’il quitte pour aller à Kolwezi, important centre minier de cuivre, cobalt, uranium et radium du Congo Kinshasa.
Verckys & l’Orchestre Vévé
En 1968, Mario Matadidi le globe-trotter retourne à Kinshasa, et intègre l’Orchestre Vévé du compositeur, arrangeur, producteur et saxophoniste, Verckys Kiamuangana, participant à l’enregistrement de l’album « Dynamite Verckys » (1970). En 1971, il découvre pour la première fois l’Europe avec ce groupe, lors d’un concert à Paris, en France. C’est ainsi qu’il est de l’opus « Verckys à Paris », dont le populaire « Lucie Okolinga Ngai », interprété avec Sinatra et Djeskain.
C’est aussi avec l’Orchestre Vévé que Mario Matadidi chantera pour la première fois « Anna », en souvenir de Mlle Anna qui était au centre de son différend avec Moro Beya Maduma. Il l’interprétera aussi avec Trio Madjesi & l’Orchestre Sosoliso.
Trio Madjesi
En 1972, Mario Matadidi, Marcel Loko Massengo aka Djeskain et Saak Saakul dit « Sinatra » quittent l’Orchestre Vévé pour fonder le Trio Madjesi – Madjesi est composé des initiales de ses trois membres fondateurs : « Ma » de Mario, « dje » de Djeskain et « si » de Sinatra. Avec l’Orchestre Sosoliso, ils enregistrent plusieurs tubes, dont « Benadioko », « Feza », « Luzolo », « Camarade ekufaka », « Butteur », ou encore « Longoma Olive »…
Leur musique, rumba ou soukouss aux parfums soul et jazz, chantée dans diverses langues, la valorisation du patrimoine musical, leur look décontracté (contrairement aux « costumés »), leur danse frénétique (tirée du « bidunda-dunda » du peuple Basakata du Congo Brazzaville), leur jeu de scène et leurs coiffures afro séduisent un large public, faisant de ce trio influencé par James Brown une des formations les plus populaires de la région – Loko Massengo est originaire du Congo Brazzaville, Saak Saakul, du Congo Kinshasa (RDC), et Mario, d’Angola, d’où cette variété linguistique (lingala, swahili, kikongo, français…). Soutenus par l’Orchestre Sosoliso, ils tourneront dans plusieurs pays d’Afrique et dans le monde, et enregistreront, jusqu’à leur scission en 1978, près d’une trentaine de disques (45 tours, albums). Des retours seront tentés sans succès.
Formation mythique de la musique congolaise, Trio Madjesi a inspiré de nombreux artistes et groupes congolais, dont Viva La Musica de Papa Wemba et Empire Bakuba de Pépé Kallé…
Mario Matadidi en Angola, le pays de ses ancêtres
Après la dissolution de Trio Madjesi & l’Orchestre Sosoliso, Mario Matadidi rentre au pays de ses ancêtres, l’Angola, et intègre, à Luanda, Os Merengues, un orchestre très en vogue à l’époque. Par la suite, il fonde son propre groupe, Inter Palanca, comprenant Teddy (solo guitare), Franco (saxophone), Domé et Sassa (trompette), Kinito (percussions), Mogue (basse), André (trombone), Mick (tambours), Timex (guitare rythmique) et Diana, Sexito Pop et Mustang (chœurs). En compagnie de son groupe, Mario Matadidi développe de l’afro-fusion ou de l’afro-pop, des musiques entre semba et kizomba angolais, rumba et soukouss congolais, merengue et salsa africaine (afro-cubain), agrémentée de soul, jazz, funk ou pop. Ses textes, chantées en lingala, swahili, kikongo, français, portugais ou créole portugais, parle de l’Angola, dénonce la colonisation, les guerres civiles en Afrique, les politiciens véreux, la corruption, et appellent à l’unité, la justice sociale, l’éducation de la jeunesse et bien sûr l’amour. Très vite, il se fait une grande popularité en Angola, avant de partir en 1990 en France, où il vivra la sortie d’un album et deux compilations de Trio Madjesi : « Génération Force Unie » (CD – 1993), « Butteur » (Compil – 1997) et « Sosoliso & Trio Madjesi » (Compil – 2005).
Retour en Angola après 15 ans passés en France
Cette même année 2005, Mario Matadidi retourne de nouveau en Angola, où il sort « Masikilu », un album aux couleurs semba, kizomba et kilapanga angolais, rumba et soukouss congolais et afro-cubain, enregistré au studio Radio Vial, à Luanda, et chanté en français, lingala, portugais et kikongo. On y entend « Un Angolais à Kinshasa », une chanson relatant son enfance en République Démocratique du Congo, la rue Itaga où il a grandi à Kinshasa, mais aussi son séjour à Lubumbashi, dans la province du Katanga, sans oublier son passage dans l’Orchestre Vévé de Verckys Kiamuangana, et sas amis du Trio Madjesi & l’Orchestre Sosoliso, comme Marcel Loko Massengo aka Djeskain et Saak Saaku dit « Sinatra ». Suit en 2007 « Memorias » (Mémoires), une compilation sortie chez Ngola Musica et comprenant treize de ses plus célèbres titres sélectionnés par Poeira no Quintal, dont Inter Palanca, A. Nossa Terra E Boa, O Camarada Presidente Disse, Bakokosa Po Bakosa, Volta Camarada, Café, « Um minuto de silêncio », « Paciência » ou encore Nkuwu…
Avec Mbokamusika